John Muir, stupéfait de la beauté de la vallée ossaloise
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Kev Reynolds, le « sherpa des mots »

Françoise Besson s’est multipliée pendant (et avant) le Festival. Elle a préparé les rencontres avec les auteurs américains. Elle les a traduites et animées. Et Françoise, professeure émérite au département des études anglophones à l’université Toulouse Jean Jaurès, a aussi présenté Kev Reynolds, dans le beau château de Béost, vendredi 17 juin, à l’abri d’une canicule qui dévalait dans la Vallée d’Ossau. Françoise a traduit, pour les éditions MonHélios, les textes de Kev Reynolds, sous le titre Marcher dans les nuages. Sa présentation, retranscrite ci-dessous, est un hommage émouvant à l'éclectique écrivain, parti à 78 ans en décembre dernier.

« Je suis en quelque sorte un sherpa des mots » (1). C’est ainsi que se définissait Kev Reynolds, montagnard, écrivain, photographe et guide, auteur d’une cinquantaine de livres, guides des montagnes du monde (Pyrénées, Alpes, Himalaya) et aussi de certaines régions d’Angleterre (2), de récits de voyages, d’un livre pour enfants et de deux recueils de poèmes.

Ce pyrénéiste « faisait le plus beau métier du monde », disait-il également, puisqu’il passait une partie de sa vie dans les montagnes et l’autre à écrire et à partager sa célébration de cette nature qu’il aimait tant.
Ce sont les Pyrénées qui ont été à l’origine de cette amitié, entre auteur et éditeur, aussi solide que les montagnes qui l’avaient générée.

Et c’est aussi grâce à elles et à la revue Pyrénées que j’ai découvert Kev Reynolds. C’est ma mère, qui y était abonnée depuis longtemps — elle qui m’avait déjà soufflé le sujet de ma thèse, à savoir les voyageurs anglais dans les Pyrénées — qui me dit un jour qu’il y avait un magnifique article d’un montagnard anglais qui avait une écriture aussi poétique que Russell. Et je découvris donc Kev Reynolds à travers ses mots d’abord et son article « Passion pyrénéenne » (Pyrénées n° 226, 2006).

Célébrer la beauté du monde

Pour ma mère et moi, il devint définitivement lié à Russell (ce qui l’amusait). Et comme je projetais d’organiser un colloque sur la montagne, Kev Reynolds fut le premier écrivain que je décidai d’inviter. Il s’ensuivit un an et demie d’échanges électroniques (ce qu’il me rappelait souvent) avant que je ne le rencontre en personne à l’aéroport de Blagnac, le reconnaissant à son pas de montagnard et aussi parce que j’avais vu sa photo avec ses grands amis les frères Ravier, dans le livre qui leur était consacré, Jean et Pierre Ravier, 60 ans de pyrénéisme (aux éditions du Pin à Crochet).

Pendant ce colloque, sa connaissance de la montagne, sa gentillesse, son humour conquirent tous ceux qui l’approchèrent. C’est pendant ce colloque que mes collègues et moi découvrîmes tous les livres qu’avait écrits Kev Reynolds sur les montagnes du monde et notamment les Pyrénées et les Alpes. Et dans le bus qui nous conduisait à Gavarnie où devait se dérouler la lecture devant la Grange de Holle (sur une idée de Michel Fabbro qui s’y était rendu spécialement pour faire les photos qui devaient illustrer le flyer de présentation), lorsque je commençai à avoir quelques problèmes pour indiquer à mes compagnons de voyage quels étaient les sommets qui apparaissaient, c’est à Kev que je fis appel pour qu’il leur serve de guide ; et il accepta avec le sourire de prendre place près du chauffeur pour commenter les paysages et donner les noms des montagnes.

50 livres, guides et récits de voyage

C’est lui qui a orchestré le livre des 50 ans de la maison d’édition Cicerone en contactant tous les auteurs, en écrivant, en pilotant. Et il faisait de tout élément apparemment négatif un moment de créativité et de joie. Quand le confinement a commencé, lui a commencé à écrire des poèmes, un par jour, ce qui a donné lieu à deux recueils ; mais son voisin et moi avons dû beaucoup insister parce que sa modestie était telle qu’il ne voyait pas pourquoi ils valaient la peine d’être publiés. Pour ses petits-enfants il a écrit un livre pour enfant, Grand’Pa Brenner and the Camel, magnifique histoire d’évasion par le rêve et l’imagination devenant la réalité.
Ce livre, il va être distribué dans les écoles de Katmandu et des villages de montagne du Népal.

Parce que Kev, « le sherpa des mots », continue et continuera à nous faire sourire et à nous demander de célébrer la beauté du monde, du plus petit brin d’herbe ou de la chenille descendant en rappel d’un arbre du Kent, aux sublimes sommets de l’Himalaya.

Célébrer la beauté du monde dans la joie, toujours, ce qu’il a fait jusqu’au bout de la vie ici, et qui ne l’empêchait pas de dénoncer les destructions de notre monde et de mettre avec colère le doigt sur les changements qu’il percevait dans les paysages pyrénéens notamment et de suggérer les solutions dans la décroissance. Kev écrivait comme un musicien de la nature, voyant dans « Ma mère l’Oye » de Maurice Ravel, le vallon de l’Essera, écoutant le chant de deux rossignols dans la montagne en étant bouleversé devant la beauté de ce chant d’amour.

Les Pyrénées, c’était sa demeure spirituelle, comme il le répétait, et toujours il y revenait. Ses grands amis depuis plus de trente ans, les frères Ravier (lui ne parlait pas français, ils ne parlaient pas anglais, mais ils se sont toujours compris) étaient dans son cœur où qu’il soit.

L’univers a décidé de rappeler dans les étoiles Kev et le jeune frère Jacques Ravier, le même jour, le 10 décembre 2021, jour aussi où ma mère aurait eu 100 ans, elle qui m’avait fait découvrir Kev dans la revue Pyrénées.

« Il n’y a pas de hasard » disait Michel Fabbro, autre grand pyrénéiste et mon frère de cœur, tous étaient unis par l’amour de la montagne, des Pyrénées. Michel a conduit Kev et Min son épouse, compagne de tant d’aventures montagnardes, et moi au lac de Besiberri, un jour de 2013, où Kev faisait de nouvelles vérifications pour la nouvelle édition de son guide des Pyrénées, Walks and Climbs in the Pyrenees, premier guide qu’il a écrit et dont la 7ème édition révisée a été publiée en 2019.

« Que dit Kev ? »

C’était la dernière course que je faisais avec Michel, qui avait conduit quelques années plus tôt mon père à ce lac de Besiberri pour sa dernière course en montagne, lui qui lui avait fait faire ses premières randonnées et sa première escalade, dans la face nord du Vignemale quand il avait 18 ans. Il n’y a pas de hasard…

Et Kev réunit toutes celles et tous ceux qui aiment la montagne. Et toujours, en marchant dans les montagnes, quand on est égaré ou qu’on s’interroge sur le sentier à prendre, on pourra dire « que dit Kev ? »

Ses guides, remarquablement bien documentés, qui comportent des petits encarts historiques toujours plaisants et utiles et de nombreuses photos, sont parmi les plus utilisés chez les montagnards anglophones ; et il n’était pas rare, comme il le raconte dans une des histoires publiées en 2013 dans A Walk in the Clouds. Fifty Years Among the Mountains — sorti peu après dans une édition américaine et maintenant en français chez Monhélios — qu’il se trouve dans un refuge où plusieurs montagnards étudient son guide sans savoir que l’auteur est près d’eux, ce qui l’amusait beaucoup, lorsqu’il entendait : « que dit Kev ? »

Kev guidait ses compagnons de montagne pendant la journée et le soir, il s’asseyait tranquillement dans les refuges pour rassembler ses notes, ses photos et ses idées, essayant, comme le dit Jonathan Williams dans son hommage, « de voyager incognito ».

Les trekkers étaient à l’extérieur du refuge, étudiant leur itinéraire pour le lendemain et avant de sortir le guide, l’un d’eux dit « que dit Kev ? » Comme un leitmotiv, cette question entendue un jour près d’un refuge et reprise sur le site de son éditeur, revient souvent dans les hommages. Et chacun, en cherchant son chemin, se dira encore, « que dit Kev ? »

Ce livre, Marcher dans les nuages, il a décidé de l’écrire il y a quelques années pour raconter certaines de ses aventures vécues dans les montagnes du monde. C’est grâce aux éditions Monhélios qui fêtent cette année leurs vingt ans d’existence et font vivre la littérature des Pyrénées et de la montagne en général, que ce livre peut être présenté aux lecteurs français.

Tout l’été dernier a été un été magnifique d’échanges entre Kev et moi. Nous étions dans les montagnes, il revivait ses aventures, répondait sans relâche à mes innombrables questions (Scott sait que mes questions sont innombrables quand je traduis ! —Scott Slovic, qui animait la présentation ; link: actualites/scott-slovic-l-engagement-par-le-poids-de-la-plume). Il a vu le livre dans son format électronique et en était heureux. Et je suis sûre qu’il est quelque part au milieu de nous et sourit et nous dit comme dans son dernier message « le soleil brille toujours ».

Il y a 75 histoires où l'on retrouve la poésie et l’humour de Kev, son empathie, son sens de l’autre. Il aimait les êtres, humains et non humains, autant qu’il aimait chaque élément de la nature, qu’il savait célébrer même quand son souffle ne lui permettait plus de marcher.

Attentif à tout, il vous ouvrait les yeux et montrait, comme il le raconte dans une de ces histoires, qu’un aveugle voit parfois plus clairement le monde que ceux qui voient.

Chaque randonnée, chaque escalade étaient pour lui « l'occasion de parler des autres, de toutes ces femmes, de tous ces hommes, de tous ces enfants rencontrés au coin d’un sentier des Alpes, d’une rue indienne, dans les montagnes de l’Atlas, du Pérou ou de Turquie, ou sur un pont tibétain ou népalais » (3), des femmes joyeuses du Dolpo « qui, malgré la vie si dure qu’elles mènent, chantent et rient sur un pont tout en filant la laine et en dansant. Danser au-dessus de la rivière » (Postface, p. 241)

Marcher dans les nuages derrière Kev, c’est comprendre que « les souvenirs ne sont pas des éléments du passé, mais des pas en avant vers la conscience du monde et de l’autre » (Postface, p.244).

Ecoutons sa voix en lisant ses mots...

Dans les Pyrénées :

« Pendant deux semaines, nous eûmes la vallée pour nous. Pas seulement la vallée, mais les montagnes qui l’entouraient. Nous grimpions toute la journée sans voir personne, revenant en fin d’après-midi pour découvrir de nouvelles fleurs qui émergeaient de l’herbe autour de la tente ; il y avait des gentianes acaules, des primevères, deux types d’orchidées, et un éparpillement d’érythrones dent-de-chien.

Nous marchions des heures à travers des prairies fleuries dégagées ; le plus minuscule des papillons bleus vagabondait autour de nous ; nous entendions des marmottes qui lançaient leurs premiers appels après l’hibernation, et nous regardions une petite harde d’isards traverser une avalanche à grands bonds. Les boutons des rhododendrons s’ouvraient maintenant et notre tente était entourée de couleur. La vallée devenait une vallée de fleurs, une vallée d’une rare perfection. Et pendant deux semaines inoubliables, elle fut notre terrain de jeu privé. »

Kev Reynolds, « La dernière vallée verte », Marcher dans les nuages, Pau : Monhélios, 2022, p. 32


« Il y avait une route qui allait au nord à partir de Benasque. Elle était là de nombreuses années auparavant lors de ma toute première visite dans ces montagnes, mais elle n’allait pas loin – seulement jusqu’au lac du barrage et pas plus loin. Une piste remplaçait la route et nous conduisit vers le nord.
En 1897, Harold Spender descendit la vallée de l’Ésera à partir de sa source au milieu des glaciers. Dans son récit de ce voyage, il mentionnait cette piste : « Nous sommes passés devant les bains de Vénasque... et un peu au-dessous, nous avons rencontré des ouvriers employés pour construire une route sans aucune méthode. Cette route sera- t-elle jamais terminée ? Seuls les dieux ont la réponse ».

Maintenant, comme nous arrivions aux baños de Benasque – les bains de Vénasque de Spender – je vis que les dieux avaient pris leur décision. Au-dessous, sur une large plaine fluviale, un véhicule d’entrepreneur crachait des nuages de fumée de moteur diesel.

Le crépuscule se formait au moment où nous prenions le virage pour entrer dans le sanctuaire supérieur, et nous étions encore sur la piste creusée au bulldozer qui n’était pas là dix-huit mois auparavant. Elle conduisait plus profondément dans la vallée avec une insistance que je redoutais. Un gué de béton avait été construit dans la rivière, et là où les véhicules l’avaient utilisé, leurs pneus qui dérapaient avaient arraché la végétation sur les deux rives. Ce qui était autrefois une prairie sacrée portait les cicatrices de la boue séchée et les empreintes des roues, non des animaux. Des rhododendrons nains avaient été profanés et des arcs-en-ciel d’huile tourbillonnants coloraient les flaques sur la piste.

Un pressentiment me hantait, et à chaque pas, je glissais plus profondément dans un abîme de tristesse.
À cinquante mètres du site de la terrasse idyllique où Keith et moi avions campé, la piste grossière finissait par s’arrêter. Trois voitures étaient stationnées là : deux espagnoles et une française. Des boîtes de carton jonchaient les buissons, elles pourrissaient après une averse de pluie. Des bouteilles de vin avaient été fracassées contre un rocher. Du papier toilette flottait dans les branches d’un pin, et des boîtes de conserve rouillaient dans le torrent.

« L’homme urbain motorisé, écrivait Fernando Barrientos Fernandez, n’a aucun sens de la responsabilité envers la nature ni aucune considération pour sa préservation. »
Je montai tristement jusqu’à cette terrasse spéciale pour découvrir une cabane d’ouvriers en métal, placée exactement là où nous avions mis notre tente en ces temps chéris où la montagne était belle. Jours innocents. Mais maintenant le site était profané, l’innocence de la vallée était trahie.

Il était trop tard pour envisager de partir, aussi, nous montâmes la tente sans enthousiasme tandis que l’obscurité avalait les intrusions de laideur. Là-haut sur les pentes de la Maladeta, le feu de camp d’un berger rougeoyait comme un phare. On apercevait à peine les glaciers, pourtant, une silhouette dans l’ombre qui se détachait sur les neiges lointaines annonçait que les montagnes demeuraient encore. Mais dans la nuit, je m’éveillai d’un sommeil agité tandis qu’un vent arrivait de l’ouest. Il trouva une plaque de polyéthylène et l’envoya se rabattre contre les cordes de la tente.

Et je me demandais : « Où ira boire l’isard maintenant ? »

Kev Reynolds, « La dernière vallée verte », Marcher dans les nuages, Pau : Monhélios, 2022, p. 33-34.


Dans l’Himalaya :

« Depuis aussi longtemps que je connaissais Ray, sa vue était faible, mais cela ne l’avait jamais empêché de faire les choses qu’il aimait, et tous les étés, il allait faire des randonnées dans les Alpes avec un couple d’amis pour jouer le rôle de ses yeux. Il se débrouillait sur un sol plat, pouvait à peu près affronter les sentiers qui montaient mais, dans une descente, il trouvait chaque pas difficile à évaluer. Aussi, ses amis voyaient pour lui. Puis la vue disparut complètement dans un œil, laissant l’autre si sérieuse- ment affaibli qu’il en devint presque inutile.

« Mon seul regret, me dit-il un jour, c’est que je ne suis jamais allé dans l’Himalaya.
- Qu’est-ce qui t’en empêche ? » demandai-je. Et là-dessus, nous commençâmes à planifier un voyage de plusieurs jours à travers les montagnes. Seuls, quatre d’entre nous y allèrent, ainsi que notre guide et porteur Kirken et son équipe de Sherpas et de porteurs.

Commençant à Gorkha, nous passâmes vingt-quatre jours à marcher à travers les contreforts de Manaslu, à monter et à parcourir le massif du Ganesh Himal, entrant dans la vallée de Langtang, puis sur le Laurebina La et descendant à travers les terrasses de Helambu jusqu’à Katmandou. Vingt-quatre jours de Colin-Maillard Himalayen, avec Ray « voyant » le paysage, non pas avec ses yeux, mais à travers tous ses autres sens.
Partager les sentiers avec lui m’apprit que la vue peut vous rendre aveugle. Pourquoi ?

Quand on a le don de la vue, un paysage tout entier peut être saisi d’un seul coup d’œil. Les souvenirs sont dominés par des images visuelles ; ils sont presque unidimensionnels. Mais sans la vue, ce sont les bruits, les parfums et le toucher qui passent au premier plan. Mon voyage avec Ray donnait une compréhension plus intense et plus profonde du monde autour de nous. Il passait une main sur les rochers, les arbustes et les arbres qui bordaient le chemin. Il s’arrêtait, la tête penchée d’un côté, et je me rendais compte qu’il écoutait quelque chose. Alors, j’écoutais aussi, et je capturais le son d’un oiseau ou d’un insecte, ou peut-être un torrent lointain ou la brise qui agitait les feuilles ; des sons qui m’auraient échappé autrement.

J’avais conscience que ses narines détectaient le parfum d’une fleur ou l’odeur de terre d’une terrasse fraîchement retournée par une charrue de bois tirée par un buffle. Il savait avant nous que nous approchions d’une auberge ou d’un village encore assez loin. Et comme il avait été spécialiste des arbres pendant toute sa vie professionnelle, il savait à côté de quelles espèces nous passions simplement en touchant leurs troncs du bout de ses doigts.

Les Sherpas et les porteurs l’aimaient et l’admiraient. Maila avait pour mission de le guider, se tenant à son bras lorsque le sentier était rude ou exposé, ou lorsque nous traversions des champs de neige ou des rivières, ou des passerelles faites de deux planches. Sans avoir une langue commune, tous les deux développèrent une manière de se comprendre. Comme j’avais déjà fait plusieurs treks avec Maila, mon respect pour sa patience augmenta. Quant à Ray, mon ami se transforma en héros.

C’était le printemps, et vers la fin de notre voyage, nous nous trouvâmes dans une forêt de rhododendrons. Les arbres à l’écorce rose se dressaient majestueusement comme des chênes anglais, mais contrairement aux chênes anglais, les rhododendrons avaient un tronc mince, leurs branches étaient moins nombreuses, et les fleurs qui jaillissaient d’eux et flamboyaient allaient du blanc au pourpre profond en passant par le rose magnolia. Entre les arbres, les pics enneigés du mur arctique de l’Himalaya étaient des rappels lointains d’un temps maintenant derrière nous. La ligne oblique de rayons de lumière traversait notre chemin, et Ray marchait en franchissant des stores vénitiens de soleil et d’ombre. Mais c’étaient les fleurs de la taille de lampes torches qui s’emparaient de notre imagination, car chaque arbre était orné d’une guirlande de couleurs – couleurs que Ray ne pouvait pas voir.

Maila eut une idée de génie. Indiquant que Ray ne devrait plus bouger et attendre, il alla d’arbre en arbre en cueillant des fleurs, puis les rapporta soigneusement à notre ami. Le nectar de chacune des fleurs fut versé dans ses mains en coupe, puis Maila lui dit de boire.
Bien qu’il fût incapable de voir leurs couleurs, Ray était capable de goûter leur beauté. Et tandis qu’il faisait cela, une larme glissa sur sa joue. »

Kev Reynolds, « Un goût de beauté », Marcher dans les nuages, Pau : Monhélios, 2022, p. 179-180.

(1) Alan Jowett, “A huge vote of thanks to our retiring editor Kev Reynolds”, Crockham Hill Village Newsletter, December 2021 January 2022. https://www.paperturn-view.com/crockham-hill-village-newsletter/decemberjanuary- issue-final?pid=MjA204407&p=5&v=10

(2) 50 livres, guides et récits de voyage. C’est lui qui a orchestré le livre des 50 ans de la maison d’édition Cicerone.

(3)) Marcher dans les nuages, Postface de Françoise Besson, Pau; Monhélios, 2022, p. 242

A lire,les textes sur site de Cicerone et l'hommage rendu à Kev.

Photo : Jonathan Williams

Texte : Françoise Besson.